« Nous avons décidé de ne pas mener à bien le projet d’exploitation de la carrière de Brueil-en-Vexin. » Dans une lettre adressée au préfet yvelinois ce mardi 12 avril, Bruno Pillon, président France de Heidelberg Cement (auquel appartient Calcia, Ndlr), a confirmé au représentant de l’État l’arrêt du projet d’exploitation d’une carrière cimentière de 105 ha en plein cœur du parc naturel régional du Vexin français à Brueil-en-Vexin.
Si le soulagement était de mise pour les membres de l’AVL3C, les maires du Vexin et les parlementaires du secteur, le projet étant dans les tuyaux depuis plus d’une vingtaine d’années, les premiers restent toutefois vigilants. Le permis d’exploiter court en effet jusqu’en 2029 et le décret signé par les ministres de l’économie et de la transition écologique n’a pas été abrogé, ce que demandent les parlementaires. Des interrogations subsistent également concernant la remise en état de la carrière de Guitrancourt, qui arrive en fin d’exploitation.
« On a des milliers de raisons de se réjouir, et notre territoire va garder toute sa beauté et son avenir », se satisfait de la décision Bruno Caffin (SE), ancien maire de Brueil-en-Vexin et ancien élu au parc naturel régional du Vexin. Il se rappelle notamment des inquiétudes que suscitaient le projet pour la vie du village : « Les habitants du secteur, beaucoup sont partis, beaucoup ont vendu leurs maisons pour ne pas voir ça […]. Ça ne se sentait pas trop ces derniers temps puisque l’immobilier était un peu reparti, que les maisons recommençaient à se vendre, mais beaucoup de gens hésitaient à venir dans un village qui proposait une école pour les enfants à 400 mètres d’une carrière cimentière. » Sa successeure, Martine Tellier (SE), met en avant une « décision raisonnable », allant « dans le sens de l’histoire et de l’écologie ».
L’ancien élu met également en avant les soutiens très forts reçus contre le projet, jusqu’à celui récent du président du conseil départemental, Pierre Bédier (LR), après l’annonce du déménagement du siège social et d’une partie des salariés des Technodes à Guerville vers Nanterre (Hauts-de-Seine). « C’est ainsi une étape importante dans l’action que nous menons activement depuis de nombreuses années avec les élus du territoire pour préserver le cadre de vie et les paysages du Parc Naturel du Vexin, ainsi qu’au regard d’enjeux environnementaux importants », a-t-il exprimé sur Twitter.
Pour autant, la récente décision du tribunal administratif, le 1er avril, rejetant deux recours formulés contre cette exploitation, par le PNR du Vexin, les communes, les associations et les particuliers reste encore dans les esprits. « Décider de ne pas poursuivre ça ne veut pas dire on abandonne », relève toutefois la présidente de l’AVL3C, Dominique Pélegrin, prenant pour exemple le fait que Calcia n’a pas abandonné les recours toujours pendants devant les tribunaux.
En revanche, pour le député de la 9e circonscription, Bruno Millienne, cette décision reste « logique » au vu de la situation : « Il y a un contrat qui est signé, et on sait que ce genre de contrat est compliqué à défaire. » Le parlementaire évoque une visioconférence s’étant tenue en novembre avec Bruno Pillon où aurait été évoqué l’arrêt du projet : « Il m’a dit de toute façon la carrière pour nous c’est un projet d’un autre âge, on renonce à l’exploitation de la carrière. […] On a l’assurance maintenant puisque c’est officiel qu’ils n’exploiteront pas la carrière. »
Avec Michèle de Vaucouleurs (Modem) et Michel Vialay (LR), respectivement députés des 7e et 8e circonscriptions, il avait interpellé la ministre de la transition écologique le 4 avril dernier, afin de demander l’abrogation du décret d’autorisation d’exploitation. « [Cette décision] Ils pourraient la prendre, ils en prennent d’autres et politiquement ce serait intelligent de le faire maintenant », souligne Michel Vialay qui, dès 2017, avait remis un dossier à Nicolas Hulot pour demander l’arrêt du projet.
Le parlementaire appelle cependant à rester vigilant et rejoint Dominique Pélegrin sur les devenirs des sites de Guitrancourt et la cimenterie de Gargenville, dont le four s’est arrêté le 4 décembre dernier. « Il y a 100 ha, plus 50 ha sur la commune de Juziers, qui correspond à une ancienne carrière […] qui n’a jamais été réhabilitée, ce sont des terrains pollués. Et ils ne disent pas quel est le projet, l’orientation, avance Dominique Pélegrin. Et Guitrancourt […] vous avez d’un côté le centre d’enfouissement des déchets et de l’autre l’actuelle carrière qui est finie, quasi. Mais c’est un trou et ils sont censés la rendre à l’agriculture […] dans un an. Il y a toujours un vaste trou, qu’est-ce-qu’il va se passer alors que ça doit être réhabilité ? »