Port de Triel/Carrières : Ports de Paris obtient gain de cause en appel

Quatre ans après le dernier jugement, la cour administrative d’appel de Versailles a finalement estimé que le projet du port industriel de Triel/Carrières est « légal ».

Nouveau rebondissement dans le dossier du port industriel de Triel-sur-Seine et Carrières-sous-Poissy. Alors qu’en 2018 le tribunal administratif de Versailles avait retoqué le projet porté par Ports de Paris (Haropa Ports), le 24 mai dernier, le délibéré de la cour d’appel a finalement inversé la donne en allant contre l’avis du rapporteur public. La construction de ce port sur le site de la marina Port Saint-Louis refait ainsi surface au grand dam des associations à l’origine des premiers recours.

Déposé il y a dix ans pour « améliorer la desserte portuaire de la boucle de Chanteloup » ce projet, qui vise à édifier un port industriel de « près de 34 hectares » entre les communes de Triel-sur-Seine et Carrières-sous-Poissy, occupe les avocats depuis 2014. Date à laquelle la commune de Villennes-sur-Seine ainsi que deux associations locales se dressent contre le projet en formulant un recours devant le tribunal administratif de Versailles. Elles craignent les nuisances que pourraient engendrer l’activité industrielle et estiment que le projet « n’a plus de raison d’être aujourd’hui ».

En mettant en avant un manque de précisions sur les activités prévues sur le site et des écarts au nouveau code de l’environnement, les opposant obtiennent l’annulation de l’arrêté préfectoral autorisant la construction du port et de la déclaration d’intérêt général du projet. Ports de Paris et le ministère de la transition écologique avaient ensuite fait appel de cette décision.

Concernant les « projets de développement » prévus dans la zone, l’arrêté du tribunal révèle « l’accueil de sociétés dont l’activité porte sur la valorisation des déchets ».

Le match retour s’est déroulé le 17 mars 2022 devant la cour administrative d’appel de Versailles. Malgré le nouvel avis défavorable du rapporteur public, les juges ont finalement estimé que le projet « est légal » et que l’étude d’impact apportée était « suffisante s’agissant en particulier de la description de l’état initial du terrain, des effets potentiellement négatifs de ce projet sur l’environnement et le voisinage, ainsi que des mesures ­compensatoires prévues ».

Le point principal retenu par les juges pour annuler le premier jugement réside dans la prise en compte par ce dernier d’une réglementation antérieure au dépôt du dossier par Ports de Paris. Le tribunal estime ainsi que les griefs au code de l’environnement ne pouvaient pas être retenus dans la mesure où le dossier de son projet avait été déposé le 24 mai 2012 et le texte de loi édité quelques jours plus tard, le 1er juin. « Ce n’était pas conforme sur plein d’aspects, notamment sur la question du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux et du plan de prévention des risques d’inondation », maintient Laurent Maillard, président de l’Association pour la protection et la tranquillité de l’environnement et des rives de Seine.

« C’était vraiment inattendu, on tombe de haut », s’étonne de son côté le conseiller municipal carriérois Anthony Effroy (FI), président de l’association Rives de Seine nature-environnement. Ce dernier déplore une forte dissonance par rapport aux conclusions des juges du premier degré « qui avaient verrouillé le sujet disant qu’on ne doit pas se baser sur la date de dépôt du dossier, mais sur la date de la délivrance de l’autorisation (l’arrêté préfectoral émis en 2014, Ndlr) », rappelle-t-il. Contacté Haropa Ports, salue une décision « qui va dans le sens de notre action de développement du transport fluvial et d’une logistique vertueuse et qui reconnaît la qualité du projet porté ».

Malgré cette décision de justice favorable, Ports de Paris indique qu’il compte réinterroger le projet tel qu’il a été déposé. « Nous avons à cœur de prendre en compte les enjeux d’aujourd’hui et les inquiétudes exprimées en renouant le dialogue avec les acteurs du territoire afin d’aboutir à une vision partagée de la desserte fluviale de la Boucle de Chanteloup et de son développement économique », précise le directeur général délégué d’Haropa Port Paris, Antoine Berbain, qui ajoute que « le projet se poursuivra en cohérence avec le territoire. ». D’après nos informations, les associations devraient se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État.

Mise à jour du 9/06 : Suite à la parution de notre article qui indiquait qu’Haropa Port Paris envisageait toujours la poursuite de son projet de port industriel sur les communes de Triel-sur-Seine et Carrières-sous-Poissy, l’établissement public a tenu a préciser ses intentions. Une mise à jour a été faite.

La vocation de traitement de déchets finalement reconnue ?

L’arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles a également précisé l’activité des sociétés qui vont s’installer dans la zone. Si le directeur général délégué de Haropa Port Paris continue d’assurer que les « projets de développement » concernent notamment « la filière bois », les justifications du tribunal prédisent également « l’accueil de sociétés dont l’activité porte sur la valorisation des déchets ». Les juges se sont appuyés sur le fait que le transport de ces derniers par voie d’eau permettrait de réduire le transport routier pour confirmer « l’intérêt général » du projet.« Ça avait toujours été contredit par Ports de Paris donc là c’est ressenti comme une vraie révélation, réagit Laurent Maillard. C’est très inquiétant parce que ça suppose derrière l’implantation d’une usine de traitement. »