
Si à Amsterdam les actionnaires de Stellantis votaient tranquillement le parachute doré de leur ex-PDG Carlos Tavares à 35 millions d’euros, à Poissy, l’ambiance était nettement plus morose en ce 15 avril. En effet, plus d’une centaine de salariés du groupe automobile ont remisé leur bleu de travail le temps d’une journée car ils craignent une chose : voir leur site de production fermer, condamnant ainsi 2 600 personnes dont 1 900 ouvriers.
« C’était une mobilisation non-syndicale, détaille Jean-Pierre Mercier, délégué syndical SUD. Tout ce que nous avons fait, c’est passer une pétition. ». Le militant retiendra une image forte lors de cette journée : « Pour la première fois, même les sous-traitants nous ont rejoints : GSF, Derichebourg, Forvia, Geodis… des personnes que l’on connaît depuis plus de 30 ans pour certains. » Et les nouvelles qui arrivent aux oreilles des employés ne sont pas bonnes.
Tout d’abord, point d’investissement à l’horizon dans de nouveaux outils de production alors « qu’il nous faudrait une nouvelle plateforme pour les futurs véhicules » selon le délégué syndical. De plus, d’autres indiscrétions finissent par le convaincre qu’après l’Opel Mokka, le déluge : certains sous-traitants commenceraient déjà à baisser leur rythme de production. « Ceux qui nous fournissent les sièges, les panneaux de côté, les planches de bord… nous indiquent que la direction s’apprête à lever le pied de manière très conséquente après les congés d’été » s’alarme Jean-Pierre Mercier. Par ailleurs, il s’étonne de ne voir toujours que deux équipes alors « qu’on devrait tourner sur trois ». « On ne va pas tenir la distance jusqu’en 2028 » s’alarme-t-il.
Pourtant, en face, la direction se veut rassurante. En février, Éric Haan, le nouveau directeur du site pisciacais, assurait que vingt ouvriers en CDI seraient recrutés prochainement, et que ce chiffre montera jusqu’à une trentaine d’ici cet été. « Pour l’instant, il n’y en a que 9 » rétorque le syndicaliste qui a déjà vu des usines en cours de fermeture embaucher des personnes : « On prend des jeunes à 1 300 balles car cela ne coûte pas cher à licencier. »
Face à une possible fermeture, les salariés sont déjà sur le qui-vive et ont fait savoir leurs revendications. Pour les plus anciens, ils désirent la garantie d’un congé senior plus long que les trois ans et mieux indemnisé que les 70 % proposés actuellement. Puis pour ceux qui continueraient à travailler, être assurés d’avoir un CDI avec un salaire équivalent à l’extérieur, une prime supra légale de licenciement et un congé de reclassement suffisamment long et indemnisé pour suivre des formations professionnelles nécessaires à retrouver un CDI. Enfin, pour ceux qui voudraient rester dans le groupe automobile, l’assurance de pouvoir « se reclasser dans le site Stellantis de son choix, avec, au minimum, un poste équivalent et dans de meilleures conditions financières qu’actuellement ».
Un comité de mobilisation sans étiquette syndicale a donc été créé mardi dernier. Celui-ci a fixé au 29 avril, date du CSE (comité social et économique) ordinaire, le délai de réponse de la direction, sous peine de voir d’autres événements de ce genre se répéter.