Départ des Roms « avant l’été », promet le sous-préfet

Lors d’une réunion publique à destination des riverains du camp jeudi soir, le sous-préfet a assuré de leur départ. Les Triellois ont reproché l’inaction passée de l’Etat.

La soirée s’annonçait mal, comme en témoignait l’affiche virulente d’opposants au camp de Roms, apposée à la colle forte sur la porte de la salle municipale, au plus grand déplaisir du maire Joël Mancel (DVD). Mais les 130 Triellois présents, très majoritairement des riverains du camp, seuls prévenus de cette réunion publique, sont restés relativement mesurés dans leurs propos… du moins en ce qui concerne la communauté Rom.

Ils ont surtout exprimé leur colère envers l’Etat, en la personne du sous-préfet de Saint-Germain-en-Laye, Stéphane Grauvogel, dont la présence a cependant été appréciée. Ce dernier, est venu leur confirmer l’évacuation du dernier camp de Roms de l’ex-plaine maraîchère, le long de la RD1, pour « avant l’été », sans s’engager sur une date plus précise. Ces riverains, eux, n’ont toujours pas compris pourquoi l’Etat, très actif depuis un an, avait mis autant de temps avant d’agir.

Les Roms, issus de trois villages en Roumanie, s’installent dans la plaine à partir de 2007, venant de Pierrelaye (Val d’Oise), après avoir quitté Achères en 2002. Début 2017, leur nombre atteint environ 600 personnes, et de violents incendies se produisent. Les communes signent des arrêtés, que l’Etat applique en évacuant, en septembre, les trois camps initiaux. L’un d’eux se reconstitue aussitôt le long de la RD1, au rond-point d’entrée de ville, sur un terrain du conseil départemental des Yvelines où seule une famille vivait jusque-là.

« On a été un peu dépassé » lors des évacuations, reconnaît le sous-préfet. Dans le camp restant, il recense 138 personnes, dont une soixantaine de mineurs, même si les week-ends, le camp peut rassembler plus de 400 personnes venues des alentours. « Il y a des désagréments, nous en sommes conscients », admet le sous-préfet. « Il y a plein de conditions qu’il faut réunir, très complexes et très lourdes, pour évacuer ces camps », explique-t-il ensuite à une assistance peu convaincue.

« A partir du moment où vous avez un site où personne ne se plaint, on ne va pas les renvoyer ailleurs », explique le sous-préfet de l’arrivée des Roms dans la plaine, en 2007.

« Pourquoi le droit n’est il pas appliqué à Triel ? », avait demandé un riverain peu avant, évoquant l’arrêté d’insalubrité pris par la commune. « Le droit laisse la liberté au préfet », pointe Stéphane Grauvogel : « On fait du cas par cas. Certains sont très insérés, travaillent pour la communauté urbaine ou des communes, et ont parfois des difficultés à trouver un logement. D’autres familles ne sont pas dans ce schéma, d’autres ne sont pas prêtes à quitter le travail de la ferraille. »

Dans l’assistance, le reproche porte surtout sur la période de 2007 à 2017. « Pourquoi attendre que la situation soit explosive ? On a beaucoup laissé faire, on arrive à un point de saturation, et ça va coûter cher », déplore une riveraine sur la question des déchets. « Les élus et l’Etat ne sont pas complètement hors sol, on a 8 000 Roms en Île-de-France (et 16 000 en France selon lui, Ndlr) », répond le sous-préfet, qui ne s’est départi ce soir-là ni de son calme, ni d’une certaine pédagogie.

La suite n’a pas vraiment satisfait les présents. « A partir du moment où vous avez un site où personne ne se plaint, on ne va pas les renvoyer ailleurs, explique-t-il des années qui ont suivi leur installation. Que les gens manifestent et s’expriment, ça a une influence, c’est le principe de la démocratie Madame, en réalité, et c’est très bien comme ça. » Il ne convainc cependant pas le public de riverains, qui pointent le respect de la loi parfois scrupuleux que leur demande parfois l’Etat.

Reste le cas particulier de la piste cyclable, parfois utilisée en voiture par les habitants du camp actuel, parfois utilisée comme casse automobile pour des carcasses. « La Ville a demandé au Département d’interdire la circulation sur les pistes cyclables, le Département ne l’a pas mis en oeuvre, pourquoi, on ne sait pas », regrette Christian Bouteloup, adjoint à la sécurité. Faute d’être présente à la réunion, malgré la demande du maire, la collectivité ne peut y répondre. « Il ne s’agit pas de faire du Département un bouc émissaire, il a un rôle assez marginal », défend le sous-préfet.

Dix ans de tension autour des camps de Roms

Arrivés progressivement à partir de 2007, lorsque la plaine maraîchère est devenue incultivable, suite à l’interdiction d’y faire pousser quoi que ce soit ordonnée par l’Etat, les communautés Roms ont rapidement déclenché des tensions parmi les habitants, en particulier ceux de Triel-sur-Seine. Contrairement à Chanteloup-les-Vignes ou à Carrières-sous-Poissy, la municipalité trielloise a en effet rapidement accueilli les enfants présents dans les écoles communales.

« Dans la classe de mes enfants, il y en a, et c’est aussi très compliqué à l’école, on fait à côté des toilettes, on crache dans les carafes », s’émeut un parent d’élève lors de la réunion de jeudi dernier, lorsque le débat a brièvement tourné autour des difficultés d’intégration. Est alors évoqué le seul cas grave intervenu en une décennie : « J’étais le papa de l’enfant qui a pris le couteau sous la gorge à la cantine. Mais c’est moi qui était fautif ! », s’étrangle le concerné, justement présent dans le public.

Plusieurs réflexions, issues d’une dizaine de personnes, liées à leur délinquance ainsi qu’à leur richesse supposée, ont aussi parsemé la soirée. Quelques autres, parfois membres d’associations assistant ces familles, y ont répondu. « Depuis 40 minutes que je suis là, je n’ai entendu aucune proposition positive », regrette l’un d’eux, proposant la création d’une aire spécifique qui leur soit dédiée, à l’image de l’aire de grand passage prévue pour les gens du voyage, avant de hausser le ton : « Qu’est-ce qu’on veut ? La solution finale, comme dans le pays voisin il y a 80 ans ? »