D‘une logique d’aide à une logique de partenariat avec l’Afrique 

Après des années d’aide au développement, l’Afrique décolle économiquement. Le territoire yvelinois a toujours été solidaire avec l’Afrique, il peut aujourd’hui s’investir dans son développement économique. C’était le message principal des rencontres « d’YCID et d’ailleurs » organisées samedi à Mantes-la-Jolie.

A l’heure où les pays occidentaux sont en panne de croissance, le développement africain représente un défi pour le monde, peut-être le plus grand du siècle à venir. C’est dans cette idée que le groupement d’intérêt public Yvelines Coopération Internationale et Développement (YCID), créé en 2015 par le Conseil départemental des Yvelines, a souhaité insuffler, au Parc des expositions ce samedi 15 octobre, une nouvelle voie d’échange dans la coopération du Département vers l’Afrique.

Une première édition où acteurs associatifs, organismes de formation, entreprises et élus étaient invités à répondre à la problématique suivante : « Comment créer plus de richesses et la partager plus justement ? ». C’est d’ailleurs par ces mots que Michel Vialay, maire de Mantes-la Jolie, a ouvert ce moment de réflexion, d’échanges et de collaboration entre ces acteurs de terrain. Une journée qui a permis de tordre le cou à de nombreuses idées reçues et de découvrir de belles initiatives.

L’Afrique ne se lit pas exclusivement sous le prisme de la pauvreté et l’immigration. « Le continent revêt en effet certaines forces au moment d’entamer la 3ème mondialisation » a notamment prévenu Pierre Bédier, président (LR) du Département. Pour Jean Michel Debrat, directeur général d’Africa France (une association d’entreprises françaises et africaines, Ndrl), « il y a là-bas un fond¨s de croissance, de 5 à 10 %, qu’il faut soutenir », car selon lui « les nombreuses créations d’entreprise ces dernières années et l’indépendance du continent face à la crise mondiale » sont des indicateurs favorables.

Si les pays africains ne souffrent pas de la crise pétrolière actuelle, tous les intervenants s’accordent à dire que les Yvelines « doivent coopérer toujours plus » pour pallier les manques en termes d’infrastructures. « Le niveau territorial est primordial, c’est ici que se construisent nos politiques publiques de demain » a martelé Cyrile Bellier, directeur adjoint de l’Agence française de développement (AFD).

Les premières rencontres d’YCID et d’ailleurs ont aussi permis de prouver que de nombreux intérêts convergeaient à plus d’échanges entre les Yvelines et le continent africain. « Il faut changer notre regard sur l’Afrique » insiste Pierre Bédier qui a rappelé au passage que de nombreuses entreprises françaises avaient boudé l’Afrique pour la Chine, ces dernières années. « Il y avait un fond de racisme, ils ont pris les Africains pour des incapables » s’est épanché le président d’un Département  où le commerce avec l’Afrique est aussi important en valeur que celui avec l’Asie. 

Pierre Bédier rappelle que le Maroc, comme le Sénégal, ne sont plus des pays en voie de développement mais des pays émergents : « la diaspora en France a tout changé ». C’est aussi ce qu’a démontré un atelier animé l’après-midi par Pape Biram Thiam, coordinateur du Programme d’appui aux initiatives de solidarité pour le développement (PAISD). On y apprend que 1,5 milliard d’euros sont investis au Sénégal chaque année par les « Sénégalais de France », qui ont contribué à la création de 400 entreprises.

Des entrepreneurs français ont aussi trouvé des solutions « gagnant-gagnant » pour soutenir la croissance africaine. Laurent Prieur développe, à travers sa startup Ubicell depuis 7 ans, un système de récupération d’énergie solaire permettant d’alimenter les systèmes de communications, nécessaires au développement économique du continent. Il se félicite de cette journée « car à travers YCID », dit-il « les pouvoirs publics yvelinois ne favorisent pas uniquement des grandes entreprises déjà implantées sur ce continent, mais surtout des PME et TPE qui peuvent apporter d’autres solutions complémentaires ».

Qu’est-ce qu’ YCID ?

L’aide publique au développement de la France représente environ 9,5 milliards d’euros. Si l’Etat en est le principal contributeur, près de 5 000 collectivités françaises agissent aussi pour améliorer le quotidien des populations défavorisées dans les pays en développement. Les Yvelines ont voté en 2007 une aide d’un euro/habitant et par an pour participer à cet effort. 

Créé le 13 mars 2015 sous l’impulsion du Conseil départemental des Yvelines, Yvelines coopération internationale et développement permet une large coopération entre les secteurs privé et public. Trois objectifs découlent de cette coopération yvelinoise : Soutenir les initiatives de solidarité internationale, accroitre les relations économiques et promouvoir le département et ses forces dans le monde entier.

Une idée au cœur de cette initiative : mutualiser les moyens pour des actions plus efficaces. YCID permet, grâce à une partie de l’aide qu’y consacre le Département, d’atténuer les impacts du mal-développement dans les pays du Sud en favorisant un développement humain et social plus équilibré, dans le cadre des initiatives portées par les associations, communes, écoles… des Yvelines. Le groupement d’intérêt public compte aujourd’hui 180 membres. En 2015, les projets qu’il a soutenus ont représenté un investissement total de plus de 2 millions d’euros.

MICRO-TROTTOIR

Avec le dispositif « 1€/habitant tous les ans » les Yvelines sont le département qui fait le plus pour la coopération internationale en France. Y a-t-il un intérêt pour nous Yvelinois de coopérer avec l’Afrique ?

200-320-vignette-bedier« On partage la même langue, on a une communauté culturelle très forte avec l’Afrique. Notre force c’est la francophonie. On a une histoire commune depuis la colonisation, lors de la 2ème mondialisation. Replacer la France sur la scène africaine, c’est préserver pour la France une place centrale dans le monde. La France éternelle d’ailleurs a été sauvée à Brazzaville. Pour un chef d’entreprise, cela va plus vite d’aller à Dakar, Lomé ou Abidjan qu’en Asie ou à Doha. Surtout, on parle français et c’est toujours plus agréable. »
– Pierre Bédier,
président du Conseil départemental des Yvelines

jmtetard« L’Afrique est un continent jeune où 50 % de la population a moins de 15 ans. Le continent est face à un incroyable défi : éduquer et former ceux qui feront son futur. Agir pour l’Afrique aujourd’hui, c’est travailler sur les problématiques de demain. Comment peut-on penser qu’il y aura un équilibre chez nous tant que ça n’ira pas bien là-bas ? On ne peut pas s’inquiéter des flux migratoires et ne pas agir. Contrairement à ce que l’on pense, ça ne met pas notre budget en difficulté. Toutes les sensibilités politiques doivent s’associer à cette idée et faire consensus .»
– Jean Marie Tetart, président d’YCID

sylvie« Bien entendu, la coopération avec l’Afrique peut même permettre de créer des emplois en France ! Notre organisation intervient dans des endroits en crise humanitaire ou dans des zones sevrées en accès à la culture et à l’information. Avec l’Ideas Box (une bibliothèque mobile, Ndrl), cela nous permet d’envoyer une médiathèque de 100m² compactée en deux palettes. Une fois dépliées, elles se transforment en tables, chaises et tout le matériel nécessaire. Face au succès de cette innovation, l’activité de BSF a explosé, passant en quelques mois de 15 à 60 salariés. »
– Sylvie, engagée dans l’ONG Bibliothèque sans frontières

200-papa-whalid« Grâce à la diversité de notre population, la France peut se lancer dans le défi du XX ième siècle, vis-à-vis de l’Afrique. Aider ces populations c’est aider des français, des yvelinois dans leur pays d’origine. On parle d’initiatives locales, pas de gouvernement à gouvernement, c’est plus efficace, mieux ciblé, plus rapide. Les Français d’origine africaine doivent être à l’impulsion de cette coopération car ils en sont le trait d’union. Ils peuvent nous permettre de replacer notre pays à une place centrale dans le monde.»
– Papa Wali Danfakha,
PRG Les Mureaux

200-edgar« L’Afrique a bien des choses à apprendre aux occidentaux. Nous, par exemple, nous amenons des bénéficiaires français du RSA, souvent au chômage depuis longtemps, sur des chantiers solidaires là-bas. L’atmosphère de ce continent, l’expérience de vie et l’enseignement de certaines méthodes relancent ces personnes à leur retour ici. Nous avons au Sénégal tout un tas d’outils pour la préservation de notre environnement dont la France peut aussi s’inspirer. »
– Edgar Tohouegnon,
président de la Maison des Yvelines au Sénégal