Face à l’insécurité, la Mairie adapte ses festivités

Rendez-vous incontournables des beaux jours, la fête foraine et le festival Contentpourien ne se dérouleront pas comme d’habitude. Pour des raisons de sécurité, la Mairie a décidé de limiter les festivités à 19 h. Ce qui a provoqué l’ire des forains et l’annulation du festival.

En mai, fais ce qu’il te plaît… Mais seulement lorsque les conditions optimales sont réunies. À Mantes-la-Ville, l’ambiance pré-estivale s’installe avec l’arrivée de la fête foraine lors de la Pentecôte et s’affirme ensuite avec le festival Contentpourien. Cependant, cette année sera différente pour les Mantevilloises et Mantevillois qui comptaient y faire un saut. Déjà, parce qu’ils ne pourront pas assister à ces deux événements. En effet, l’un va devoir fermer boutique à partir de 19h tandis que l’autre – prévu initialement du 28 au 30 juin prochain au Parc de la Vallée – est tout bonnement annulé. Pourtant ce n’était pas l’objectif de la Mairie.

« Le but premier était seulement changer le périmètre pour cette année exceptionnelle » explique-t-on du côté de l’hôtel de Ville. Tout d’abord, le plan Vigipirate a été relevé à son niveau maximum – urgence attentat – ce qui oblige toutes les collectivités à rester sur leur garde car, malheureusement, ces événements tragiques n’arrivent pas qu’aux autres. Magnanville, Conflans-Sainte-Honorine ou Rambouillet en sont les tristes témoins. Ensuite, l’arrivée des Jeux Olympiques dans l’Hexagone rime avec déploiement d’un dispositif de sécurité conséquent. « Les forces de l’Ordre vont être beaucoup sollicitées » pointe la commune mantevilloise. En effet, entre le passage de la flamme dans le département le 23 juillet, et les épreuves sur le territoire, les polices municipales et nationales vont être fortement mises à contribution. Enfin, le contexte local y joue aussi pour beaucoup.

Toujours des tensions entre quartiers

« Nous nous sommes rendus compte que les tensions déjà existantes entre quartiers commencent à se raviver » déplore la mairie. Une « guerre » latente depuis plus d’une dizaine d’années avec en point d’orgue l’assassinat du jeune Wahid. Le 9 juin 2014, ce jeune homme de 22 ans qui habitait dans une zone pavillonnaire au-dessus de la cité des Merisiers depuis trois ans, est abattu d’un coup de fusil dans le thorax. À l’époque, même s’il était connu des services de police pour des vols ou trafic de stupéfiant, celui qui était en train de passer un bac pro était surtout victime de son entourage d’après ses proches. Selon leurs dires, la nuit du meurtre, Wahid avait séparé plusieurs jeunes – issus des quartiers des Merisiers, du Village et du domaine de la Vallée – qui se battaient rue du Parc, aux abords de la fête foraine.

Malheureusement une décennie plus tard, l’atmosphère reste toujours tendue. Il y a un mois, plusieurs dizaines de véhicules garés aux Merisiers ont été vandalisés, ce qui a provoqué le même type de dégradation dans la zone du « Bas du Domaine » les jours suivants. « C’est une minorité d’individus, une cinquantaine environ, qui provoque ce désordre » explique le maire SE Sami Damergy. L’édile et son équipe assurent qu’ils suivent cela de près : « Nous mettons en place des dispositifs. Les centres de vie sociale vont à la rencontre des jeunes, il y a les vacances apprenantes… 6 jours sur 7 il peut ne rien se passer mais un drame serait déjà trop. » Ils remarquent également que ces échauffourées se déroulent partout en France. « Des phénomènes de bande cherchant à se faire remarquer sur les réseaux sociaux et ne sachant pas du tout pourquoi ils se battent » se désole la Mairie.

Un quinzième anniversaire amer

Avant d’annuler Contentpourien, une réunion a eu lieu entre la Ville et Alexandre Aumont, son organisateur. « On comprend, dit-il d’un air dépité, ce n’est jamais agréable de voir que dans sa ville des gens puissent se tirer dessus. » Cependant, il note que l’édition précédente s’était déroulée pendant la période des émeutes (dues à la mort du jeune Naël, NDLR) sans encombre. « De plus, les gens du quartier nous connaissent, nous n’avons aucun problème avec eux et ils sont ravis de voir leur famille venir » ajoute le président de l’association À chacun son cirque. Par ailleurs, plusieurs dispositifs sont en place pour que tout se passe correctement : des fouilles systématiques à l’entrée du festival et les mineurs devant être obligatoirement accompagnés d’un adulte. Alexandre Aumont regrette surtout les conséquences de cette décision.

Plus de 1 200 h de travail qui sautent pour des intermittents du spectacle et des prestataires devant se passer de contrat de plusieurs milliers d’euros. Une annulation rendue d’autant plus amère puisque Julian Marley, fils de et vainqueur du Grammy awards « album reggae de l’année 2024 », devait être la tête d’affiche du quinzième anniversaire du festival. « Il profitait d’une tournée européenne pour faire escale chez nous » précise l’organisateur de Contentpourien. Par ailleurs, il précise que les activités « hors les murs » au niveau du Chaplin à Mantes-la-Jolie, à Buchelay ou avec la Compagnie des Contraires à Limay se tiendra bien. Mais si lui a déjà tourné la page et prépare déjà la prochaine édition, il n’en est rien du côté des forains.

Alexis Glon, délégué national de l’union de l’intersyndicale des entreprises foraines, menace la Mairie d’une « manifestation monstre » entre le 13 et le 21 mai. Dans les colonnes du Parisien, lui et ses compères assurent qu’ils bloqueront la commune et fait déjà tout pour chauffer à blanc ses troupes via son compte Facebook. Depuis plusieurs jours, il partage des vidéos – dans lesquelles nous pouvons voir des forains déplacer des blocs de ciments afin de mettre en place leurs attractions – ou des articles rappelant qu’ils ont déjà réussi à faire flancher les villes souhaitant les déloger comme Gargenville il y a onze ans. À l’époque, une trentaine d’entre eux s’étaient pointés devant la mairie et des bagarres avaient même éclaté.

« Monsieur le maire a fait la proposition de fermer à 19 h. Eux ne veulent pas ce créneau. Le but est de circonscrire l’événement jusqu’au coucher du soleil, avance l’équipe municipale mantevilloise, c’est pareil pour toutes nos festivités comme les fêtes de quartier. » Toutefois, elle assure que cette décision reste temporaire et que tout redeviendra comme avant en 2025 : « Utilisons ce périmètre horaire plus restreint pour que tout puisse se passer correctement, et l’année prochaine, il n’y aura aucun souci. » La deuxième quinzaine de mai permettra de juger la compréhension des organisateurs de la fête foraine sur cette décision.