« Ce que je demande une nouvelle fois c’est que ça avance et qu’on en termine. » À plusieurs reprises ce lundi 19 avril, le maire mantais, Raphaël Cognet (LR), a affirmé sa position concernant l’enquête autour du marché du Val Fourré, alors que deux délibérations le concernaient directement ou indirectement : la protection fonctionnelle accordée par la municipalité au premier adjoint Sidi El Haimer (LR) (voir encadré), mis en examen, et le rapport de la chambre régionale des comptes concernant sa gestion entre 2010 et 2018 (CRC). S’il a reconnu un manque de vigilance et de contrôle concernant cette gestion, l’édile a également profité d’une conférence de presse avant le conseil municipal, pour faire le point sur la chronologie des évènements.
« Le premier qui a demandé au commissaire de police un [comité opérationnel départemental anti-fraude] sur le marché du Val Fourré c’est moi, assure-t-il de son implication. […] Octobre 2018, j’écris au commissaire pour lui dire on a des rumeurs, ces rumeurs elles sont préjudiciables à tout le monde, […] et donc si vous le souhaitez faites un contrôle. » En avril 2019, une opération avait conduit à l’interpellation de trois placiers qui ne pouvaient justifier une différence de 1 000 euros par rapport aux quittances perçues et retrouvées en espèces sur eux.
Une perception en espèces qu’a également soulevé la CRC dans son rapport rendu public le 20 avril, puisque « sur la période 2010-2018, les droits de place, soit environ 1,2 million d’euros, ont été encaissés à 97 % en espèces », indique le rapport. « C’est beaucoup et ça permet beaucoup de choses, réagira le conseiller d’opposition communiste Marc Jammet, lors du conseil municipal. […] Après les arrestations, le chiffre d’affaires progresse nettement, passant de 278 000 euros à 547 000 euros en 2019. »
« Je rappelle que lorsque les placiers ont été arrêtés dans le cadre de l’enquête en cours, ils étaient à ce moment-là salariés de Mandon et pas de la Ville, rétorque alors Raphaël Cognet. […] Il y a une explication qui est que chacun assume ses propres responsabilités. » Lui attribue la baisse des recettes, de 400 000 euros en 2010 à 278 000 euros en 2017, au remembrement du marché et son passage en régie municipale. « Nous aurions dû mener des contrôles un peu plus vigoureux, reconnaît-il en conseil municipal. Si vous étiez à la tête d’une collectivité, vous vous apercevriez que les contrats complexes […] sont des contrats toujours compliqués à suivre. »
Parmi les rappels au droit et les recommandations, que le maire juge « hyper [légères] » figurent notamment la consultation des organisations professionnelles et « renforcer l’action de la commission consultative du marché du Val Fourré » en place depuis 2014. « Le travail de la CRC nous a permis de beaucoup mieux nous structurer en interne pour pouvoir suivre ces contrats complexes, se satisfait Raphaël Cognet. […] On a créé notamment le bureau du commerce qui a en charge l’activité des commerçants sédentaires et non-sédentaires, on a titré vis-à-vis de Mandon, on a corrigé un certain nombre de choses. […] Je bats ma coulpe sur l’aspect suivi des contrats complexes, je ne bats pas ma coulpe si les gens pensent qu’on a laissé faire tout ça en toute impunité et sans s’en préoccuper. »
Une passe d’armes s’est également déroulée concernant la tenue d’un conseil municipal extraordinaire, demandée par Marc Jammet « Je crois qu’on ne peut pas en rester là, d’où notre demande d’y voir plus clair, en toute transparence, puis de prendre des mesures », appuie l’opposant, qui se voit opposer une fin de non-recevoir par le maire. « Nous ne sommes ni un tribunal ni une commission d’enquête, nous n’avons pas les pouvoirs d’investigation ni d’un juge ni de la police, tranche-t-il. […] Il y a des gens qui investissent sur cette affaire […] donc on va les laisser faire leur travail, et on [ne] va pas faire des guignolades de conseil municipal extraordinaire. »
Ce jour-là, Raphaël Cognet a également déclaré pour la première fois publiquement, que la Ville s’était constituée partie civile, une demande formulée, elle aussi, depuis de nombreuses années par Marc Jammet. « Dès le mois de septembre dernier nous avons entamé les consultations avec notre avocat pour pouvoir nous constituer partie civile et faire les études juridiques nécessaires, détaille le maire, brandissant un document. Lorsque ces études juridiques sont parvenues à leur terme, nous avons saisi le juge pour être partie civile et nous sommes partie civile officiellement depuis le 8 janvier. »
Interrogé sur sa discrétion, il précise : « Ma règle depuis le début de cette affaire c’est que cette enquête ne devienne pas un outil politique pour nos opposants ou pour moi. Donc moi chaque fois que j’ai eu des informations, à quelques moments que ce soit, je suis allé voir la police et j’en n’ai jamais fait état […]. Parce qu’une enquête c’est un truc secret, il y a un truc qui s’appelle le secret de l’instruction. […] Ce que je demande une nouvelle fois c’est que ça avance et qu’on en termine, parce qu’il y en a marre de ces rebondissements à la petite semaine. »
La protection fonctionnelle accordée
au premier adjoint
Lors du conseil municipal du 19 avril, une délibération concernait également l’octroi de la protection fonctionnelle du premier adjoint, Sidi El Haimer (LR), dans le cadre de sa mise en examen pour subornation de témoin dans l’enquête concernant le marché du Val Fourré. « Voter la protection fonctionnelle, cela signifierait que le juge reproche à l’intéressé d’avoir suborné des témoins en tant que représentant de la ville, c’est une question qui a toute son importance, qui est grave, donc on votera contre », souligne l’opposante communiste Armelle Hervé.
« Il s’agit d’une affaire autour du marché du Val Fourré, Sidi El Haimer est premier adjoint au maire, né dans le quartier du Val Fourré et y exerce ses fonctions d’élu donc évidemment qu’il y a un lien entre ses fonctions d’élu et ce pourquoi il est mis en cause, et c’est ce pourquoi nous lui accordons la protection fonctionnelle », justifie le maire, Raphaël Cognet (LR), de cet octroi.
Contacté le 14 avril, l’avocat du premier adjoint, maître Alexandre Simonin, précisait que lui et son client avaient « été entendus le jeudi 8 avril » et se montrait plutôt serein : « Ça s’est bien passé, je pense que nous irons jusqu’au procès mais nous sommes plutôt confiants. […] On l’accuse d’avoir exercé une subordination de témoin, mais concrètement la charge de la preuve me paraît difficile à apporter au vu de ce qui nous a été présenté. Ce qui a été exposé c’est que l’un des plaignants aurait, selon lui, reçu la visite de gros bras du Val Fourré et on attribue des liens, aux fondements hasardeux, entre mon client et ces gens-là. »
Crédits photo article : CAPTURE ECRAN YOUTUBE – VILLE DE MANTES-LA-JOLIE