30 ans après, Mathieu Kassovitz revient sur les traces de la Haine

Plus de trente ans après le tournage de la Haine, Mathieu Kassovitz est revenu à Chanteloup-les-Vignes le 31 mai. Alors qu’il prépare l’adaptation de son film en comédie musicale, le réalisateur a échangé avec les élèves de 3ème du collège René-Cassin.

« Pourquoi ce titre ? » demande un élève de la 3ème 2 du collège René Cassin. « Cela représentait la haine que les jeunes avaient envers la police et vice-versa » explique Mathieu Kassovitz, présent dans l’établissement scolaire le 31 mai afin de parler de son film culte qu’il va adapter en comédie musicale. Toutefois, le réalisateur avait joué au filou avec le maire de l’époque Pierre Cardo. « Dans le scénario que je lui avais transmis, c’était écrit « droit de cités », sinon il n’aurait jamais accepté ma venue » avoue le metteur en scène d’un ton malicieux. Toutefois, le politicien avait sans l’ombre d’un doute le sourire jusqu’aux oreilles en lui annonçant la couleur : « Maintenant, il va falloir vous faire accepter par le quartier ». En effet, alors que Kassovitz, Vincent Cassel, Saïd Tagmaouï et Hubert Koundé viennent à peine de poser leur valise dans un appartement situé non loin de la gare, des cailloux sont jetés sur leurs fenêtres.

« Ils nous prenaient pour des flics infiltrés. Ensuite les gars ont été clairs, jamais une caméra ne filmerait la Noé », se remémore le réalisateur. Toutefois, après discussions avec certains grands frères comme Abdel Moulah, l’équipe du film peut enfin s’installer. Même si cela donne le droit à quelques anecdotes. « Un jour on se fait voler nos talkies-walkies, et on entendait les gars discuter entre eux car ils n’avaient pas changé la fréquence. « Mohammed rend le matériel j’ai reconnu ta voix ! » Et lui il répond « non, ce n’est pas moi » tranquillement » narre-t-il, hilare.

N°2 au box-office italien récemment

Autre interrogation de la part d’une élève : « Et le fait que cela soit un film culte ? ». Pour le coup, Mathieu Kassovitz ne l’avait pas vu venir. Le récipiendaire du prix de la mise en scène au Festival de Cannes 1995 savait qu’il se lançait dans un projet atypique, « hormis Costa Gravas et Ken Loach, peu de réalisateurs s’intéressaient à ces thématiques », que son père lui-même ne comprenait pas : « « Pourquoi tu traînes avec ces racailles ? » me demandait-il, « mais papa, cela pourrait être tes enfants, ton frère ! » ». Le presque soixantenaire feint-il la modestie ? Quoiqu’il en soit, La Haine avait ramené deux millions de personnes dans les salles obscures et traverse toujours aussi bien les années. Récemment, 170 cinémas italiens ont décidé de le rediffuser et le film s’est hissé à la deuxième place du box-office.

Le réalisateur n’était pas venu seulement pour répondre aux questions des collégiens mais également faire passer quelques messages : « Vous avez bénéficié du combat de vos grands frères qui ont changé la définition du mot quartier. Maintenant des personnes qui en sont issues sont partout dans les médias comme Omar Sy et Jamel Debbouze. »

Par ailleurs, le réalisateur n’était pas venu seulement pour répondre aux questions des collégiens mais également faire passer quelques messages : « Vous avez bénéficié du combat de vos grands frères qui ont changé la définition du mot quartier. Maintenant des personnes qui en sont issues sont partout dans les médias comme Omar Sy et Jamel Debbouze. » De plus, il a tenu à rappeler que la haine ne mène à rien. C’est pour cela que la fin du long métrage reste mystérieuse. Que cela soit le policier ou Hubert qui meurt, un embrasement surviendrait. « Mais peut-être que la comédie musicale répondra à cette question » lance un Kassovitz ­énigmatique.

« La haine ne mène à rien »

Les nouveaux Vinz’, Saïd et Hubert – Alexander, Samy et Alivor – ressentent déjà la pression sur leurs épaules. « Nous voulons juste faire kiffer les gens » annoncent-ils d’une seule voix. Des trois, c’est Alivor le plus marqué par le film. Également backeur pour Médine, le Havrais n’a pas hésité à s’engager dans différents combats comme « Justice pour Adama » en remixant la chanson Arrêt du Cœur ainsi qu’en participant à plusieurs manifestations. « Finalement, on ignore beaucoup de choses, les personnes de la campagne ne connaissent pas les jeunes des cités, et inversement » philosophe-t-il.

Enfin, après plus d’une heure de questions-réponses, Mathieu Kassovitz repart. Non pas pour rejoindre directement Paris mais pour aller à la rencontre de ses « potes d’il y a 30 ans » comme Mouna qui l’attendait sur le parvis de l’établissement scolaire, puis pour manger avec les « grands-frères ».

Après la séance de questions-réponses avec les collégiens, Mathieu Kassovitz, Alexander, Samy et Alivor sont allés se balader sur les anciens lieux de tournage de La Haine