BTP : alerte sur l’emploi

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Le secteur du bâtiment représente 29 000 salariés dans le département, et de 7 à 10 % de l’activité économique totale. Les syndicats d’entreprises du bâtiment font part de leurs craintes, alors que les carnets de commandes sont réduits à quelques semaines de visibilité. En ligne de mire, l’emploi salarié, qui pourrait en pâtir si la situation persistait en 2015.

« Les chiffres d’affaires sont en baisse de 2,6 à 5 % en fonction des corps d’état et des entreprises. Ce qui nous inquiète est la baisse d’activité, la tension sur les carnets de commande et sur les trésoreries », note Bernard Attal, délégué général de la fédération française du bâtiment (FFB) des Yvelines, et de ses 1200 entreprises adhérentes.

Le secteur du bâtiment représente 29 000 salariés dans les Yvelines.
Le secteur du bâtiment représente 29 000 salariés dans les Yvelines.

« Le marché privé ne redémarre pas pour des raisons de confiance et un problème de crédits bancaires, tandis que la commande publique s’est écroulée en 2014 », estime sans fard Jean Bouzid, le président du Syndicat yvelinois des entreprises de travaux publics (SYTP), qui représente une quarantaine d’entreprises pour 5 000 salariés. Si 2013 était plutôt bonne dans le public, élections municipales obligent, cette année s’avère en très forte baisse, de 9 % par rapport à 2012. Au rang des accusés, la période de désorganisation due à mise en place de la réforme territoriale, et la réduction drastique de l’entretien des infrastructures existantes : « Nous ne demandons pas une politique de grands travaux », assure Jean Bouzid.

Bernard Attal confirme le défaut de confiance, et souhaite de nouvelles mesures de défiscalisation. Il dénonce aussi la réglementation européenne, qui permet à des entreprises de l’Union européenne de venir travailler aux conditions du pays d’origine. « Les Roumains, Polonais, Portuguais ont 30 % d’écart de charges sociales avec nous, c’est une délocalisation à l’envers », regrette le délégué.

Le dernier problème concernerait la normalisation, qu’il juge aujourd’hui excessive. « Par rapport à 1980, on peut considérer que plus de 30 % de notre prix de vente est concerné », explique-t-il. Il suggère par exemple l’adaptation des normes handicap pour ne pas l’appliquer à 100 % des logements construits dans un même bâtiment.

« Le risque de cause sociale est avéré » pour Jean Bouzid.
« Le risque de cause sociale est avéré » pour Jean Bouzid.

La plupart des entreprises du bâtiment yvelinoises n’auraient que quelques semaines d’avance sur leur carnet de commande. Si l’activité partielle et la formation permettront aux entreprises de ne pas licencier dans les prochains mois, elles ont déjà fortement réduit le recours aux intérimaires.

« Nous souhaitons conserver nos forces vives, qui sont notre savoir-faire et l’outil de production, mais si la situation devait perdurer, le risque de casse sociale est avéré », s’inquiète Jean Bouzid. « Il y a des motifs d’espérer car le pays est encore riche, mais il ne faut pas se voiler la face », témoigne un Bernard Attal qui se veut plus optimiste que son confrère.

Contacté, le conseil général, plus gros investisseur public du département, confirme la réduction des budgets dédiés à l’entretien et à l’investissement. Dirigé par la droite, il dénonce « un hold-up budgétaire » réalisé par la politique nationale d’austérité : « Le gouvernement ponctionne sans coup férir 100 millions d’euros, nous empêchant de boucler notre budget. […] En étranglant les collectivités, il prend le risque d’étouffer le pays. » La situation ne semble donc pas à l’amélioration, tandis qu’on observe déjà les premières défaillances d’entreprises du bâtiment sur le territoire.

Fibre optique : le conseil général fait une pause

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Quinze ans après l’adoption du haut débit avec la technologie ADSL, les institutions publiques misent sur le très haut débit (voir encadré) pour le développement économique des territoires. « C’est incontournable aujourd’hui. Des entreprises que nous finançons choisissent le site de leur implantation de bureaux ou de sièges sociaux en fonction du débit qu’elles peuvent avoir », explique ainsi Nathalie Marquet, vice-présidente d’Initiative val de Seine, la plateforme locale du réseau associatif de financement des créateurs d’entreprise Initiative France.« C’est incontournable aujourd’hui »

Depuis 2010, les gouvernements successifs ont fait le choix de partager les investissements avec les opérateurs privés. Dans les zones denses, ces derniers déploieront à leurs frais la fibre optique. C’est le cas de la plupart des communes urbaines de la vallée de Seine, couvertes par Orange. A Mantes-la-Jolie, Mantes-la-Ville et Carrières-sous-Poissy, les travaux de pose vont d’ailleurs débuter avant la fin de l’année, d’après l’ex-opérateur public. Le déploiement du très haut débit dans le reste du territoire est majoritairement à la charge des collectivités locales. Dans les Yvelines, 158 communes plus rurales sont concernées, pour environ 100 000 foyers à raccorder. Sous la présidence d’Alain Schmitz (UMP), le conseil général a adopté un plan de déploiement public en 2012.

Le très haut débit fixe arrive dès la fin de l’année à Mantes-la-Jolie, Mantes-la-Ville et Carrières-sous-Poissy.
Le très haut débit fixe arrive dès la fin de l’année à Mantes-la-Jolie, Mantes-la-Ville et Carrières-sous-Poissy.

Il prévoit le branchement de la totalité des foyers concernés au très haut débit d’ici à 2020. Il est estimé à 158 millions d’euros, dont une soixantaine à la charge nette du Département. « Ce sont des travaux considérables. Il y a 3000 km de lignes à poser, avec une couverture presque intégrale en fibre optique », explique Yves Vandewalle, vice-président chargé de l’aménagement numérique au conseil général.

Ce plan de déploiement a été depuis mis en pause par le nouveau président du conseil général, élu en avril 2014, Pierre Bédier (UMP). Les appels d’offres lancés au début de l’année pour la construction du réseau, puis son entretien, ont été annulés cet été. « J’ai fait part de mon désaccord au président lorsqu’il a interrompu les marchés, il a repris la main », détaille Yves Vandewalle à ce sujet.

L’association yvelinoise Broadband 78, dédiée au développement du très haut débit et des activités économiques qui en dépendent, est également plutôt mécontente. « Le conseil général, ne voulant pas d’une fracture digitale, avait décidé de fibrer la ruralité à 98 % », raconte du plan originel son président, Jean-Michel Billaut. Il est « dans une colère noire », et compte bien faire entendre sa voix dans les prochains mois : « Nous sommes en train de préparer une réponse, et nous allons probablement monter des conférences rurales. »

C’est quoi le très haut débit ?

Câbles de fibre optique au sein d'un trottoir.
Câbles de fibre optique au sein d’un trottoir.

Dans l’Union européenne, une liaison internet est considérée à très haut débit lorsqu’elle est capable de transmettre des données à plus de 30 Mbits/s. Une liaison ADSL classique, à haut débit, est capable de recevoir des données entre 1 et 20 Mbits/s, et d’en envoyer de 0,1 à 2 Mbits/s, selon l’éloignement du central de raccordement. La fibre optique permet des débits symétriques supérieurs à 100 Mbits/s.

Le réseau de troisième génération (3G) des opérateurs mobiles permet des débits proches de l’ADSL dans de bonnes conditions de réception. Le réseau de quatrième génération (4G), en cours de déploiement par les opérateurs, autorise des débits pouvant aller jusqu’à 100 Mbits/s, comme la fibre optique, dans des conditions de réception idéales.

Dans un courrier envoyé il y a quinze jours aux maires des communes concernées, Pierre Bédier rappelle l’investissement initial de 50 millions d’euros réalisé ces dix dernières années par le conseil général, pour le raccordement des zones d’activités et d’autres infrastructures.

Compte tenu de l’importance de l’investissement, il souhaite dans cette lettre « consacrer du temps à une évaluation approfondie » du plan actuel. Il questionne le choix d’un fibrage massif : « son coût d’installation est élevé et les délais de déploiement sont longs », explique-t-il. Pierre Bédier envisage des solutions satellitaires, et l’amélioration des technologies des réseaux téléphoniques en cuivre.

En termes d’organisation, il évoque sa préférence pour la constitution d’un syndicat mixte ouvert, rassemblant les communes et le conseil général. Cette stratégie, qui ne fait plus reposer la totalité de la gestion sur le Département, est proche de celle de l’Eure voisine. Enfin, dans son courrier, Pierre Bédier manifeste son désaccord pour le choix de contrats publics, entre la collectivité qu’il dirige, et les opérateurs choisis pour poser et entretenir le réseau. Il les estime « mal adaptés à des activités innovantes dont les paramètres […] sont en perpétuel changement ».

Cette pause de réflexion, pour le président du conseil général, ne remet « ni en cause notre ambition, ni le calendrier de sa mise en oeuvre, que j’entends au contraire accélérer », rassure-t-il en conclusion. Les nouveaux choix du Département doivent être soumis avant la fin de l’année au Comité départemental de l’aménagement numérique (CDAN), pour « la possibilité d’un accès internet à haut ou très haut débit d’ici 2020 ».

4G : Orange et Bouygues en avance

Les quatre opérateurs de téléphonie mobile possédant leur propres antennes réseau indiquent, sur leurs cartes du réseau, l’état de leur déploiement du très haut débit mobile, par la 4G. Orange et Bouygues proposent déjà une bonne couverture des parties les plus urbanisées de la vallée de Seine. La réception de la 4G est nettement plus parcellaire chez SFR et Free mobile. Orange précise que les villes d’Andrésy, de Verneuil-sur-Seine, d’Achères et de Conflans-Sainte-Honorine seront totalement couvertes en très haut débit mobile d’ici à fin 2014.

Bouygues ne compte pas étendre son réseau sur le territoire, mais informe que la couverture existante de la vallée sera densifiée dans les prochaines années. « L’intérêt de l’opérateur est d’aller le plus vite posssible », explique-t-on chez SFR, qui ne souhaite pas donner plus de précision pour des raisons de concurrence. Le quatrième opérateur, Free mobile, ne dispose pas d’un service permettant d’échanger avec la presse, son plan de déploiement n’est donc pas connu.

Une nouvelle formation technique

L’ institut du tertiaire du développement durable et de l’éco-construction (Itedec), basé à Aubergenville, met en place une formation de technicien en pose de fibre optique, qui dure un an. « Le conseil général nous a contactés il y a deux ou trois ans, il finance la mise en place d’un plateau technique fibre optique » sur le site de l’école, se satisfait Anne Bouvet, responsable commerciale à l’Itedec.

Le déploiement massif de la fibre optique sur le territoire français nécessite en effet une main d’oeuvre qualifiée, explique-t-elle : « Elle doit suivre des schémas particuliers, nos techniciens seront capables d’intervenir sur toute la chaîne, jusqu’à la box. » Une trentaine de jeunes seront formées pour cette première année, l’objectif est de 90 formations par an à terme. Chacun des sept modules est également proposé séparément aux techniciens souhaitant se perfectionner.

La Gazette en Yvelines