Conseil municipal : « pas de majorité » mais une « union » jusqu’aux élections

Jeudi dernier, la municipalité villennoise est redevenue gouvernable pour le maire. Il a congédié une adjointe, et fait entrer le groupe d'opposition au sein de l'exécutif.

« Les tensions ne vont pas disparaître comme ça, mais on a un devoir vis-à-vis des Villennois. » La phrase est du tout juste ex-opposant, Pierre-François Degand (LREM), devenu adjoint aux affaires scolaires jeudi soir à la place de Valérie Thomassen. Cette dernière a été éjectée non sans un discours de départ fracassant (voir encadré) portant notamment sur les accusations formulées ces derniers mois, à son encontre, par des agents des écoles envisageant même de porter plainte.

Depuis le mois de décembre, et un funeste conseil municipal où le maire Michel Pons (DVD) a vu toutes ses délibérations être rejetées, la commune n’était plus gouvernable faute de majorité politique. Le conseil du jeudi 15 février était l’occasion pour cet édile vacillant de retrouver sa stature de maire. Il y est parvenu, au prix d’un remaniement destiné à ce que chacune des trois listes des élections municipales de 2014 soit représentée au prorata des suffrages récoltés au premier tour.

La liste de Jean-Michel Charles (DVD) en a fait les frais : Olivier Hardouin, 1er adjoint expulsé il y a un an, reste simple conseiller municipal, et Valérie Thomassen perd sa fonction d’adjointe. La liste menée par Pierre-François Degand gagne deux adjoints : lui-même, aux affaires scolaires, ainsi que Katia Lefeuvre, sa femme (mariés en 2008, ils étaient déjà tous deux conseillers municipaux, Ndlr), désormais chargée de la communication et de la transition énergétique et écologique.

La liste de Pierre-François Degand (à gauche) gagne deux adjoints : lui-même aux affaires scolaires, et Katia Lefeuvre (à droite) à la communication et à la transition écologique.

Ce jeudi soir, le conseil municipal est quasiment au complet, tandis qu’une vingtaine de personnes sont présentes dans le public, dont l’ancien maire SE François Gourdon, venu assister à l’établissement de cette trêve entre trois de ses anciens adjoints. S’il souhaite « que ça se calme et que ça s’arrange », il n’a pas vraiment goûté le manque de formalisme de l’élection des deux nouveaux adjoints par le conseil, une fois votée l’éjection de Valérie Thomassen.

« Je suis stupéfait du vote : où est l’appel à candidatures ? Pour moi, c’est illégal. Et on compte les bulletins avant de les toucher ! Je n’ai jamais vu ce manque de respect des procédures », s’étouffe-t-il en sortant de l’hôtel de ville. Maire jusqu’en 2014, il regrette « de voir après 25 ans une telle déchirure » entre ses trois anciens adjoints. « J’étais l’un des demandeurs de la fusion entre deux listes, et je vois que les deux listes se déchirent », note-t-il de l’alliance des listes Pons et Charles.

Pour le premier, « il n’y a pas de majorité » mais « une union municipale », confie Michel Pons à la fin du conseil. Le second, dont la liste perd deux adjoints en comptant Olivier Hardouin, jamais remplacé, a exprimé « regret et tristesse » lors du vote de l’éviction de Valérie Thomassen. Selon lui, cette dernière « sert de fusible » alors qu’elle « ne mérite pas cette rupture brutale de sa vie d’adjointe pour laquelle elle s’est tant donnée ».

Des 28 voix du conseil municipal, 15 vont à la démission de l’adjointe aux affaires scolaires, puis 19 pour Pierre-François Degand, et 18 pour Katia Lefeuvre. « Une majorité s’est fortement dégagée », se félicite Michel Pons, qui rappelle : « J’ai proposé il y a plusieurs semaines qu’on forme un bureau représentatif » de toutes les tendances pour « travailler dans l’union, la solidarité », car « c’est ce qu’attendent les Villennois » afin de terminer « dans le calme et l’efficacité » les projets engagés.

Pourtant, tout au long du conseil, les désaccords se font jour, lors des débats entourant plusieurs délibérations. Jusqu’à une intervention du tout nouvel adjoint, quant à une délibération liée aux tarifs du golf, posée sur table (et non envoyée cinq jours avant aux conseillers, Ndlr). « Dans la nouvelle gouvernance, on avait demandé que ces délibérations n’arrivent pas à la fin », remarque Pierre-François Degand, prouvant par la pratique qu’il garde sa « liberté de penser », comme il l’indique ensuite en aparté. Le maire bat sa coulpe : « Tu as raison sur le principe. »

Olivier Hardouin (à gauche) et Valérie Thomassen (à droite), tous deux exclus de l’exécutif, réfléchissent à se lancer ensemble dans la campagne des prochaines élections municipales.

Cette majorité de bric et de broc tiendra-t-elle jusqu’aux élections municipales ? Car la campagne est officieusement lancée, avec déjà deux duos de prétendants : Pierre-François Degand et Katia Lefeuvre d’un côté, Olivier Hardouin et Valérie Thomassen de l’autre (tous deux sont adhérents LREM mais dans une démarche municipale « apolitique », Ndlr). Aucun n’est officiellement déclaré, mais selon nos informations, chacun des deux duos y réfléchit.

« Pour moi, c’est un déni de démocratie, je trouve que c’est irrespectueux pour les Villennois, lâche justement Olivier Hardouin à la sortie du conseil municipal. Aujourd’hui, ce que fait le maire est de dire  »je prends l’opposition et je leur donne des postes d’adjoints » : il ne faut pas s’étonner, après, si les gens vont de moins en moins voter. » D’ici à 2020, il prédit au petit monde politique villennois « deux années aussi agitées que les deux dernières ».

La prédiction est aussi celle que l’ancien maire François Gourdon adresse au « microcosme » politique de Villennes-sur-Seine. « Pour moi, un nouveau va arriver, exactement comme je suis arrivé il y a 25 ans, analyse-t-il dans un parallèle historique. C’est dans l’air du temps de ne pas être dans le système, un jeune dynamique et apolitique arrivera… »

Valérie Thomassen défend son bilan dans les écoles

Des 28 voix du conseil municipal, 15 ont approuvé la démission de Valérie Thomassen, l’adjointe aux affaires scolaires.

Adjointe aux affaires scolaires jusqu’au dernier conseil municipal, Valérie Thomassen était mise en cause par des agents des écoles communales dans la précédente édition de La Gazette, dans laquelle Michel Pons niait tout « lien direct » entre cette affaire et l’éviction de son adjointe. Valérie Thomassen a souhaité défendre son bilan dans nos pages, comme elle l’a fait au conseil municipal.

Elle assure s’être fortement impliquée auprès des agents des écoles, en septembre, suite à des courriels reçus de responsables pédagogiques. « On a un personnel, dames de cantines ou Atsem, qui a posé des problèmes aux directrices d’écoles, décrit-elle. Je considère que les gens n’agissent pas mal pour agir mal, ils prennent petit à petit de mauvaises habitudes. »

L’adjointe d’alors, au caractère aussi trempé que celui d’Olivier Hardouin, parfois perçu comme un peu brutal, a souhaité « remettre de l’ordre » au sein de « pratiques non conformes ». Alors, elle décrète qu’il faudra servir les fromages au bambins de maternelle et non leur demander s’ils en veulent, les menus « faits avec une diétiéticienne » incluant la portion de fromage.

Elle tente aussi d’interdire au personnel d’emporter la nourriture qui sera jetée, et envisage une prime afin de compenser. Mais la bronca de la petite vingtaine d’agents des écoles devient virulente et atteint le maire, qui ne la soutient pas. Doublée de la nécessité d’avoir un poste à proposer, la grogne a eu raison d’elle, estime l’ex-adjointe : « Je pense que le prétexte des dames de service l’a encouragé à vouloir me démettre de mes fonctions. »

La Gazette a pu consulter des courriels de trois directrices des écoles villennoises, dans lesquel ces dernières la remercient d’essayer de résorber les tensions régnant entre personnels municipal et enseignant. S’être aliénée aussi violemment le personnel des écoles, qui souhaitait porter plainte en diffamation suite à une lettre ouverte de certains parents d’élèves en défense de l’adjointe, « est un échec pour moi », reconnaît Valérie Thomassen.

Celle-ci reproche surtout au maire, au-delà de son éviction, d’avoir préféré la lâcher plutôt que de l’appuyer. « Soit il me suivait et on pouvait régler gentiment cette question en remettant les normes en conformité aux règles, analyse-t-elle. Il a préféré ne pas écouter les recommandations, et pour ne pas faire de vagues, il préfère se séparer de son adjointe. Je pense qu’il reporte le problème. »

Son remplaçant depuis jeudi soir, Pierre-François Degand, n’a « constaté aucun problème » avec les agents des écoles. « Ce qui est dramatique est de jeter autant de nourriture », estime-t-il. Il se propose donc d’étudier différentes options : « Donner à une association, ça peut être les Restos du coeur, ou alors récupérer ce qui est récupérable pour faire un goûter pour les enfants. »

Il se demande également si « une décharge » signée du personnel ne permettrait pas de « ne pas être responsable de la nourriture qui sort » des cantines. Nouvel adjoint aux affaires scolaires « avec une immense joie », sa fille allant d’ailleurs à l’école à Villennes-sur-Seine, il donne une seule garantie : « On va prendre ça à bras-le-corps, il faut qu’on apaise toutes ces tensions. »