
Voilà sept ans que des échafaudages sont installés sur les trois immeubles de la résidence des Pléiades (Sablons 1, Sablons 2 et Gémeaux), offrant à toute personne pénétrant dans les Mureaux des tubulures en acier comme premier spectacle. Mais contrairement à l’accoutumée, ces structures métalliques ne servent pas à un chantier qui n’en finirait donc jamais. Non, si elles sont là, c’est en tant que renfort. Un matin de mai 2018, Khadija et Thami Zouhair, résidents des Sablons, se réveillent brutalement. La cause : le vacarme provoqué par la chute de leur balcon sur celui de leur voisin du dessous. Heureusement, dans cette affaire, plus de peur que de mal puisqu’aucune victime n’est à déplorer.
Lors de la pose de la première pierre de la rénovation énergétique de la copropriété des Pléiades ce 7 mai, un représentant de Bouygues Energies et Services avance une hypothèse afin d’expliquer cet éboulement. « L’isolation entre le bâtiment et le balcon a dû être mal faite, l’humidité s’étant infiltrée, cela a endommagé la structure dans sa globalité. » Des propos qui font écho à ceux de Khadija au Parisien à l’époque : « J’ai écrit des dizaines de courriers à Foncia (l’entreprise en charge de la gestion de la copropriété, Ndlr), car on avait des problèmes de stagnation d’eau, expliquait-elle à nos confrères. Chaque matin, les jours de pluie, je prenais un balai raclette pour évacuer manuellement l’eau qui se déversait sur le balcon. » Cependant, les mésaventures du couple muriautin allaient devenir rapidement celles de l’intégralité des résidents des 168 autres appartements.
En effet, des relevés sont effectués sur tous les autres balcons et le bilan est alarmant : ils souffrent tous du même mal, avec un fort risque de voir le fait divers de mai 2018 se répéter inlassablement. Cela marque le début des problèmes qui vont, en plus, s’amonceler. Tout d’abord, installer les échafaudages a un coût, et les habitants des Pléiades voient ainsi leurs charges exploser de plusieurs centaines d’euros par an pour financer cette cage de fer, provoquant l’ire de plusieurs habitants de la résidence des Gémeaux rencontrés par La Gazette en 2020. Ensuite, les premiers devis des réparations tombent. Pour résorber la structure des immeubles, le coût par résident équivaut au prix d’un appartement. « Soit les économies de toute une vie » souffle François Garay, le maire des Mureaux. « Majoritairement, la population des Pléiades sont des primo-accédants maintenant à la retraite » ajoute Michel Vignier, le président d’une des copropriétés. Sauf, comme il s’agit d’une résidence privée, aucune aide n’est normalement prévue. Finalement, à force d’abnégation, un dispositif spécial se créait entre l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), la Région et la Ville.

Toutefois, pour débloquer des fonds, l’ANAH souhaite des travaux de plus grande envergure. « En plus des balcons, il y a aussi tout un ensemble de mises aux normes, notamment sur les sécurités, ainsi que l’isolation thermique » détaille Michel Vignier. Puis, il a fallu convaincre les propriétaires à coups de réunions publiques et de lettres d’informations. Car si l’ANAH a accepté de sortir 26 millions d’euros, tandis que l’instance présidée par Valérie Pécresse s’est engagée sur 5 millions et la Mairie environ 900 000 euros, un reste à charge pesait encore sur les résidents. « Quand on a remboursé son emprunt et qu’il vous arrive une chose comme ça, que soudain vous devez ressortir 6 000 à 10 000 euros alors que vous touchez 900 euros de retraite, c’est franchement quelque chose » note François Garay. « On a donc proposé un prêt à 7,8 %, ajoute le président de la copropriété des Sablons, le reste à charge était donc de l’ordre de 8 %. » Mais il a subitement doublé dernièrement…
Dans un contexte budgétaire national très difficile, qui touche toutes les collectivités territoriales, la Région a dû se désengager en partie, à l’instar de ce qui a failli se passer pour la rénovation du quartier des Briques rouges à Verneuil-sur-Seine. « Au total, entre 2024 et 2025, notre collectivité s’est confisquée 321 millions d’euros dans le cadre du premier projet de loi des finances, justifie la conseillère régionale Sylvie Piganeau qui représentait Valérie Pécresse lors de la pose de la première pierre de la rénovation énergétique. Cela représente 5 % de nos recettes de fonctionnement au niveau de l’Île-de-France, alors même qu’elles sont déjà diminuées de 14 % depuis 2019. » Le Conseil régional a donc pris la décision de suspendre en 2025 les politiques en cofinancement avec l’État, dont celle du logement. « Or, nous connaissons les difficultés que rencontrent les Franciliens pour se loger et la complexité des situations dans les copropriétés dégradées » poursuit celle qui est aussi maire-adjointe à la Ville de Versailles.

Néanmoins, il semblerait que des recettes régionales puissent être restituées par l’État. Si la Région ne connaît pas encore avec exactitude le montant, elle a pris la décision de les intégrer à un fonds spécial qui sera destiné à des urgences sociales. « Nous avons entendu la voix des Pléiades et nous sommes sur la bonne voie pour récupérer les fonds nécessaires à notre participation à cette opération de rénovation » assure Sylvie Piganeau.
Finalement, la pose de cette première pierre, c’est l’histoire d’une centaine d’habitants qui a pris son mal en patience et qui a continué à y croire. Durant la cérémonie, Michel Vignier rapportait les propos d’un des propriétaires tout heureux : « Je vais pouvoir continuer à vivre dans les Sablons ». Par ailleurs, un appartement témoin était à disposition afin de constater les solutions techniques retenues. Des plaques et des équerres de renfort seront donc ajoutées à tous les balcons qui perdront 14 cm en largeur à cause de l’isolation thermique, faisant tout de même le DPE de chaque appartement de E ou F à C. « C’est beau, aujourd’hui, je me dis que c’est bien qu’il soit tombé le petit balcon » glisse le président de copropriété. Il faudra encore attendre entre deux et trois ans pour voir enfin les échafaudages être démontés. « On a hâte que cette vie reprenne et que les balcons refleurissent à nouveau » conclut le préfet des Yvelines, Frédéric Rose.