À 17 h, sonna l’horreur

Samuel Paty a été décapité par un réfugié d’origine tchétchène de 18 ans, Abdoullakh Abouyezidovitch Anzorov. Ce dernier a été abattu par les forces de l’ordre à Eragny (Val-d’Oise), au terme d’une course-poursuite. Il était inconnu des services de renseignement, mais était connu de la justice pour des faits de dégradation et de violences en réunion.

La surveillance de routine a viré à l’horreur pour les policiers municipaux conflanais, premiers à avoir découvert le corps de Samuel Paty. Il est environ 17 h, ce vendredi 16 octobre, lorsqu’une patrouille de policiers municipaux effectue aux abords du collège du bois d’Aulne, dans le secteur des Hautes-Roches, quartier pavillonnaire habituellement calme, une mission « de surveillance classique », détaille le maire conflanais Laurent Brosse (DVD).

Lors de cette surveillance, ils remarquent un homme, visiblement agité, armé. À ses pieds, gît le corps de l’enseignant d’histoire-géographie de 47 ans, mutilé, et sa tête. Les policiers demandent alors l’assistance de leurs collègues de la police nationale pour arrêter l’assaillant, identifié comme Abdoullakh Abouyezidovich Anzorov, réfugié d’origine tchétchène de 18 ans et résidant à Evreux (Eure), armé de deux couteaux et d’un fusil de type airsoft. Le meurtrier prend alors la fuite en direction de la commune voisine d’Eragny (Val-d’Oise), par la rue du Buisson moineau.

« Les policiers nationaux identifiaient ce dernier à quelques centaines de mètres de là, rue Roger Salengro, dans la même commune, a précisé lors d’une conférence de presse ce samedi 17 octobre, le procureur général du parquet national antiterroriste, Jean-François Picard. À leur vue, l’individu courait dans leur direction en tirant à cinq reprises avec une arme de poing. Trois des policiers ripostaient, ce qui entraînait une chute de l’assaillant. » Ce dernier sera finalement abattu par les forces de l’ordre au niveau de l’allée des Bergeronnettes.

Les évènements s’enchaînent rapidement, selon une Eragnienne présente ce samedi 17 octobre devant le collège du Bois d’Aulne et ayant assisté à la scène. « Tout s’est passé en maximum 20 minutes, raconte-t-elle. […] Il est mort en pleine rue. On aurait dit une statue. […] La police cerclait. C’était impressionnant. Déjà on apprend que quelqu’un est décapité et après on nous dit qu’il y a un terroriste qui est par terre. »

Quelques instants avant la découverte du corps par les forces de l’ordre, un compte Twitter @­Tchetchene_270, revendiquait le meurtre de Samuel Paty, postant une photo de sa tête : « De Abdullah, le serviteur d’Allah à Marcon (sic), le dirigeant des infidèles, j’ai exécuté un de tes chiens de l’enfer qui a osé rabaisser Muhammad, calme ses semblables avant qu’on ne vous inflige un dur châtiment. » Dans le téléphone trouvé près du corps de l’assassin, les enquêteurs ont découvert « dans le bloc notes, le texte de la revendication, enregistré à 12 h 17 ainsi que la photographie de la victime horodatée à 16 h 57 », souligne Jean-François Picard.

Concernant le compte Twitter, fermé depuis la soirée du vendredi 16 octobre, « Des investigations ont pu confirmer qu’il s’agissait bien d’un compte appartenant à l’auteur des faits », note Jean-François Picard. Selon Mediapart, ce compte avait déjà été repéré fin août suite à un photomontage de décapitation. « Au regard de ces éléments, et compte tenu de la nature des faits, du contexte de leur réalisation, du mode opératoire et de la revendication, le parquet national antiterroriste s’est saisi et a ouvert une enquête de flagrance des chefs d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste, d’associations de malfaiteurs en vue de commettre des crimes d’atteinte aux personnes », a-t-il ajouté.

« Selon les premiers témoignages, l’auteur des faits se trouvait devant le collège durant l’après-midi et avait sollicité des élèves afin de lui désigner la future victime », fait remarquer du mode opératoire le procureur général du parquet national antiterroriste. Une riveraine du collège avait d’ailleurs remarqué un homme au comportement suspect.

« Je crois que je l’ai vu en fin d’après-midi, un peu avant l’heure à laquelle ça s’est apparemment passé. Il était vers le collège et tournait un peu autour, relate-t-elle au lendemain du meurtre. Il m’avait l’air bizarre. Je le voyais regarder partout. Il a même été voir des élèves […]. C’est quand j’ai appris ça après que j’ai fait le rapprochement. J’étais loin d’imaginer ça ! » Selon Le Monde, Abdoullakh Abouyezidovich Anzorov aurait abordé les collégiens en leur proposant de l’argent contre des renseignements sur ­l’enseignant.

Les investigations se poursuivent désormais « afin de déterminer l’emploi du temps de l’auteur dans les jours ayant précédé les faits », pour « préciser le déroulement exact du crime » et « établir l’implication des personnes gardées à vue ainsi que de toute autre personne complice ou impliquée à un titre ou à un autre dans les faits », a terminé Jean-François Picard.

Pour l’heure, onze personnes ont été interpellées, dont « quatre personnes issues de l’entourage familial direct de l’auteur des faits » et « deux personnes s’étant présentées spontanément en fin de soirée au commissariat d’Evreux [ayant] indiqué avoir été en contact avec l’auteur, peu avant les faits. » Selon Le Monde, un adolescent de 15 ans a également été interpellé pour avoir reçu de l’argent du tueur. À Levallois-Perret, un ami d’Abdoullakh Abouyezidovich Anzorov a également été placé en garde à vue, selon BFMTV.

Enfin, un père de famille a été interpellé à Chanteloup-les-Vignes, après avoir posté plusieurs vidéos qualifiant Samuel Paty de « voyou » et appelant à sa radiation de l’Education nationale après avoir exposé des caricatures de Mahomet dans des vidéos devenues virales (lire page 4). Le président du Conseil des imams de France, Abdelhakim Sefrioui et sa compagne, ont également été interpellés pour avoir accompagné le père de famille lors de rendez-vous avec la principale du collège du Bois d’Aulne. Selon France Info, il s’agit d’une figure de l’islam radical, fiché S.